Le Procureur Général Eddy Minang réplique aux avocats de Sylvia et Noureddin Bongo
Ce 23 juillet 2025 à Libreville, un climat tendu secoue le monde judiciaire gabonais, alors que le Procureur Général de la Cour d’appel de Libreville,le Dr Eddy Minang, a vertement réagi à une série de déclarations jugées inappropriées émanant des avocats de Sylvia Bongo et de son fils Noureddin Bongo Valentin, tous deux poursuivis dans le cadre d’une affaire politico-financière à retentissement national.
Dans une déclaration officielle dont la teneur ne laisse place à aucune ambiguïté, le magistrat a dénoncé le ton condescendant et les propos outranciers tenus par certains conseils de la défense, notamment un avocat inscrit au barreau de Paris.
« Je me réserve, par ailleurs, le droit de saisir le Bâtonnier de l’Ordre des avocats de Paris », a affirmé le Procureur Général, rappelant que ce n’est pas la première fois que ce type de comportement est observé de la part de cet auxiliaire de justice étranger.
L’affaire n’est pas sans précédent. Le magistrat rappelle qu’en 2013 à Dakar au Sénégal, ce même avocat s’était déjà signalé par des propos malveillants à l’endroit du Procureur spécial près la Cour de répression de l’enrichissement illicite du Sénégal, et même à l’encontre du Président de la République de l’époque, avant d’être contraint de présenter ses excuses.
Mais au-delà de la seule question disciplinaire, le procureur fustige une posture néocoloniale persistante, qu’il considère comme symptomatique d’un mépris sous-jacent pour la justice africaine :
« Je n’arrive toujours pas à comprendre ce prétendu complexe de supériorité, quasi maladif, que nourrissent certains occidentaux à l’égard des Africains. Ce complexe, fondé exclusivement sur l’histoire coloniale et la couleur de peau, devrait définitivement cesser », a-t-il lancé.
Aussi, le Procureur Eddy Minang ne se contente pas de réagir émotionnellement : il rappelle son propre parcours académique pour souligner l’égalité de compétence entre magistrats africains et occidentaux.
« Si un auxiliaire de justice, titulaire d’un Master en droit, ne daigne avoir de considération pour un Procureur Général, il devrait, à tout le moins, en avoir pour un Docteur en droit formé à l’Université Paris-Panthéon-Assas, là même où lui-même a été formé », a-t-il martelé, en référence à son propre Doctorat, obtenu avec la mention « Très honorable avec félicitations du jury » pour une thèse intitulée Le crime rituel en droit pénal gabonais.
Par ailleurs, ce dernier souligne également que l’avocat mis en cause devrait se conformer au Règlement national des barreaux français, notamment à son article 10 qui exige des devoirs de modération et de délicatesse dans les communications publiques :
« Je tiens à rappeler que, conformément à l’article 10 du Règlement national des barreaux français relatif aux communications et interventions publiques, les avocats en exercice sont tenus au respect des devoirs de modération et de délicatesse. »
Rappelons que réagissant aux interprétations faites par les avocats de la défense concernant le statut juridique de ses clients, le Procureur Général a également précisé un point essentiel de procédure :
« Je me permets de préciser que, lorsqu’elle est accordée, la mise en liberté provisoire n’est nullement assortie d’une mesure automatique d’interdiction de sortie du territoire », a-t-il indiqué, en réponse aux critiques formulées à l’encontre de la justice gabonaise sur la supposée violation des droits de ses ressortissants.
En somme, par le biais de cette sortie, le procureur général Minang entend rétablir la dignité et le respect dû aux institutions judiciaires africaines, tout en dénonçant des attitudes paternalistes qui n’ont plus lieu d’être à l’heure où les compétences se construisent dans les mêmes amphithéâtres et selon les mêmes exigences.
Cette affaire illustre une fois encore le bras de fer judiciaire et symbolique qui se joue dans les dossiers sensibles, où se mêlent enjeux de droit, d’ego, et d’histoire postcoloniale. Elle montre aussi que la justice gabonaise n’entend plus tolérer les postures condescendantes, quelle que soit l’origine ou la réputation de ceux qui les adoptent.